Après la mort de Franco, l'accession de l’Espagne à la modernité démocratique coïncide paradoxalement avec une forte poussée de sentiment anti-français en Espagne. Cette hostilité s'appuie sur une longue tradition historique, fondée sur un passé conflictuel multiséculaire, même si la présence très ancienne d'un courant francophile est également attestée dans le pays. A la faveur de nouveaux contentieux, candidature à la CEE, terrorisme ETA, incidents maritimes, ou même sportifs, les schémas ancestraux sont réactualisés. Le voisin français redevient l'ennemi héréditaire : la réputation détestable du Buhonero au siècle d'or, le traumatisme provoqué par l'installation des bourbons sur le trône espagnol, et surtout les invasions napoléoniennes complètent l'argumentaire brandi contre la France. Omniprésente, tour à tour mythifiée et démythifiée, celle-ci est définie par les espagnols comme l'antithèse de leur propre pays. Cet antagonisme, aggravé par des statuts profondément inégalitaires au plan international, suscite ce qui est perçu en Espagne comme des attitudes nationales collectives, le complexe de supériorité au nord des Pyrénées, et d'infériorité au sud, ainsi que de pesantes manifestations des chauvinismes respectifs. L'admission de l’Espagne dans la CEE induit une ouverture à la fois plus large et plus variée sur l'extérieur, améliorant ainsi la position diplomatique du pays. Elle met fin, du même coup, à un face-à-face aussi ancien qu'inconfortable avec le voisin gabacho. Une meilleure écoute de la part des autorités françaises, participant enfin à la lutte contre l'ETA contribue au même titre à dédramatiser la relation bilatérale.
Book Details
- Country: US
- Published: 2000
- Publisher: Presses universitaires du Septentrion
- Language: fr
- Pages: 689
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